Compte-rendu de la petite séance de formation du 20 juillet à Ladoumègue »

Afin de préparer la rentrée et l’accueil des nouveaux, Axel a proposé des séances de formations pour « donner des billes » à tous ceux qui souhaitent contribuer à l’initiation des débutants. Sept personnes ont répondu à l’appel ce samedi : un avait intégré le club il y a un an, d’autres depuis deux ans ou plus ; certains avaient déjà pas mal initié mais sans se sentir très sûr d’eux, d’autres avaient seulement initié un proche une fois ou deux.

Nous avons présenté le passeport autonomie de Cimes 19, et le livre Escalades pour tous, puis fait un petit tour de table (sans table) pour que chacun·e se présente et identifie une difficulté qui se pose en situation d’initiation. Voici quelques difficultés ou obstacles soulevés :

– Faire grimper en tête, certes, mais comment initier à l’assurage en tête dès le départ ? C’est compliqué / dangereux

– Certains apprenants s’emmêlent les mains et semblent ne toujours pas savoir assurer au bout de plusieurs séances.

– Quand les gens ont déjà fait une séance ou deux, on ne sait pas ce qu’ils ont déjà « fait », c’est-à-dire pratiqué avec l’initiateur précédent.

– Souvent, les débutants ont du mal à adopter la position de descente adéquate une fois en haut, c’est-à-dire à lâcher les prises, s’asseoir dans le baudrier, jambes perpendiculaires au mur.

Les personnes présentes étaient dans l’ensemble convaincues de l’intérêt d’initier les gens en tête, mais ne savent pas toujours comment faire, et il est parfois rassurant de faire grimper les gens en moulinette, par crainte de les mettre en difficulté et en situation de blocage, ou en situation dangereuse si on les fait assurer par un débutant. Rappelons ici deux ou trois arguments contre l’initiation en moulinette :

– si on commence par grimper en moul’, cela devient la situation de référence de grimpe, et il faut ensuite affronter le passage à la grimpe en tête. Cela fait perdre du temps !

– l’initiation en moulinette construit une dépendance excessive au baudrier et à la corde. On peut avoir la tentation de demander « sec » à n’importe quel moment, et on n’apprend pas à chercher ses appuis. Cet écueil est accentué si l’assureur assure trop sec.

– si on habitue les gens à grimper en moul’, ils ne deviendront pas de bons assureurs en tête, car la simple idée de donner du mou leur fera peur.

Comment initier à l’escalade en tête ?

Si on est avec une seule personne assez sportive, on peut certes lui faire enfiler un baudrier, lui montrer comment clipper, en l’envoyer tout de suite à la conquête du haut du mur, en corrigeant les erreurs de clippage au fur et à mesure. Néanmoins, en procédant ainsi, on n’est pas à l’abri de mettre la personne en difficulté :

 Que  faire si elle n’arrive pas à clipper le point suivant ? Elle risque de rester tétanisée, ou de tenter la « fuite vers le haut », qui consiste à grimper au-dessus d’un point sans clipper, faute d’avoir trouvé une position de clippage adéquate. On ne lui aura appris ni à désescalader, ni à se laisser tomber en arrière dans le baudrier pour se confier à l’assureur.

Il est donc possible de procéder par étapes – et c’est souhaitable si on s’occupe de plusieurs personnes à la fois. Le nombre et la nature des étapes n’est pas figée, et est à adapter au public. On peut toutefois retenir trois éléments : pour former un grimpeur autonome, il faut construire la confiance en soi (en ses appuis), la confiance dans le matériel, et la confiance dans l’assureur :

1) Pour construire la confiance en soi, en ses appuis, il est souhaitable de faire grimper les gens… sans corde ! : leur faire faire quelques exercices de blocs, dont les objectifs principaux sont :

            a) Construire la réversibilité de la grimpe, en apprenant à désescalader.

            b) Savoir lâcher une main, trouver son équilibre sur trois appuis, ce qui permettra de clipper        la corde.

Pour ce faire, nous avons pratiqué les exercices suivants :

  • Les écureuils (p. 85) : aller déposer dans les trous du mur des chenilles (cure-pipe), une par une, puis les retirer.
  • Faire une traversée, et dire qu’au signal (« TOP ! »), les grimpeurs doivent s’arrêter et tendre la main vers une prise, mais sans la toucher. (c’est une variante du « Jacques a dit… », livre p. 84)
  • « les grimpeurs de l’anneau » (p. 93) : toujours sans baudrier, aller clipper un anneau de corde au premier point. Puis le déclipper (plus difficile!).
  • « Lucky Luke » (p. 98) : On fait enfiler les baudriers, montrer le nœud d’encordement avec des brins de corde de 3 m environ, et demander aux gens d’aller s’entraîner à clipper les 1ers points, main gauche et main droite.
  • Nous avons aussi joué à passer dans des cerceaux tenus perpendiculairement au mur, soit par le bras de quelqu’un, soit par une prise porte-cerceau : niveau 1, on passe comme on peut dans le cerceau ; niveau 2 : on passe sans le toucher. Cela permet de travailler les transferts de poids à faible hauteur.
  • La confiance dans le matériel

            On peut proposer aux gens de se vacher et de se suspendre au 1er point à l’aide d’un anneau    de corde. L’intérêt : enseigner la bonne posture pour se faire mouliner à la descente, et la             posture à adopter si on n’arrive plus à avancer et qu’on veut se reposer dans le baudrier (ou si on vole).

  • Dans le livre, on appelle ça les « ouistitis » (p. 94), parce qu’on se balance comme un petit singe.
  • Si on ne le fait pas, il faut penser à proposer aux gens d’adopter cette position dès le 1er ou 2ème point lorsqu’on les fera grimper en tête. Ainsi, il est plus facile d’expliquer et de rectifier la position si nécessaire.
  • La confiance dans l’assureur

a) On pratique des exercice d’assurage avec les deux partenaires au sol. L’un s’encorde, l’autre installe un système d’assurage. Le grimpeur grimpe jusqu’au 1er point, clippe, redescend en désescalade. Là, on montre le principe du frein, qui ne freine que lorsque le brin de vie est dirigé vers le bas. On demande à l’assureur de donner du mou au « grimpeur » qui marche en arrière sur le tapis, puis de ravaler le mou. Le « grimpeur », petit à petit, cherche à tester l’assureur, en voyant s’il peut courir en arrière ou s’asseoir dans son baudrier. Cet exercice permet d’enseigner l’assurage sans risque, mais aussi, pour le « grimpeur », d’apprendre à faire confiance à la corde et à son partenaire.

b) Enfin, on propose d’aller à la conquête du sommet avec la démarche du « gagne-terrain » (p. 101), qui consiste à se relayer pour grimper en tête (en escalade toutes prises) et clipper une ou deux dégaines, puis redescendre, en désescalade ou en moulinette, avant d’échanger les rôles avec l’assureur.

Cet exercice permet de s’entraîner à faire et refaire son nœud d’encordement et de s’entraîner à installer son système d’assurage, puisque chaque partenaire est conduit à le faire plusieurs fois à quelques minutes d’intervalle. Il permet de dédramatiser à la fois la peur de la grimpe au-dessus du point et les appréhensions liées à la descente (puisqu’on aborde la hauteur de manière progressive). Il faut ajouter que les assureurs débutants seront systématiquement contre-assurés. Le contre-assurage peut être effectué par un débutant ou par un tuteur aguerri. Il consiste a minima à tenir le brin de vie à environ un mètre des mains de l’assureur, afin d’éviter un retour au sol en cas d’erreur d’assurage. Le bon contre-assureur va aussi suggérer à l’assureur de donner plus ou moins de mou, et de se placer correctement par rapport au grimpeur : près du mur, mais pas sous le grimpeur.

Vous trouverez la plupart des exercices décrits dans les pages ci-dessous, extraites du livre Escalades pour tous, dont une partie, le fichier de jeux, est disponible au format pdf et epub gratuitement sur internet.

Nous n’avons pas de prétention à l’exhaustivité avec cette brève séance de formation, et il y a d’autres choses à voir pour rendre un grimpeur autonome. Néanmoins, ils permettent d’avoir des idées de démarches à proposer aux débutants et faux débutants. Ils présentent l’avantage d’être praticables en groupe : vous pouvez être seul avec 6 débutants et les faire grimper ! Et bien sûr, il n’y a nulle obligation à pratiquer tel ou tel exercice !

Pour revenir aux difficultés identifiées en début de séance, récapitulons des éléments de réponse :

Quid de l’initiation à l’assurage en tête ? 1) On pratique au sol 2) On propose le « gagne-terrain », donc les gens ne prennent de la hauteur que progressivement 3) On met un contre-assureur
Comment expliquer les gestes d’assurage ? Certains s’emmêlent les pinceaux… 1) On n’est pas obligé d’expliquer les gestes. On peut expliquer le principe (ne jamais lâcher le brin de vie + brin vers le haut, ça ne freine pas, brin vers le bas, ça freine), puis laisser les gens expérimenter au sol, avant de leur montrer des gestuelles possibles (assurage à 5 temps ou avec la main qui glisse). 2) Si les gens « s’emmêlent » les mains, on leur fait pratiquer plus longtemps le ravalage du mou, avec le partenaire au sol qui avance. Autres exercices : – le Remonte-pente ou automoulinette (p. 105) ; – faire hisser un sac un peu lourd (exercice utilisé par les profs d’EPS).
Comment savoir ce que les gens ont appris et ce qu’il reste à faire ? (éviter les doublons et les oublis) 1) Avant de se tourner vers le passeport autonomie, qui n’a pas toujours été rempli à chaque séance faute de temps, il faut demander aux gens ce qu’ils ont déjà appris, ce qu’ils savent déjà faire. Ainsi, on rappelle ou on complète. Et ce n’est pas grave de proposer un exercice déjà fait à la séance précédente. Les apprentissages seront consolidés !
Comment faire pour que les débutants ne restent pas « debout » dans leur baudrier lorsqu’ils se font mouliner à la descente 1) Leur proposer soit de se vacher au premier point avec un anneau de corde ou une longe, soit  d’adopter la bonne position à différentes hauteur sur le mur. Leur proposer de se balancer et de plier un peu les jambes pour s’amortir. Cela les préparera pour l’initiation au vol des séances suivantes !

Ressources :

– La première partie d’une séance d’initiation parents-enfants, menée par Yves Renoux.

– Le livre Escalades pour tous, dont le chapitre 3 est en téléchargeable ici

Le livre est disponible en trois exemplaires à Ladoumègue, dans le casier administratif, et il est empruntable. Le chapitre 1 est aussi très utile pour les démarches d’initiation (plus orienté « adultes », moins ludique).